Le coeur lourd [Neutre, privé Kadaj]

Eireen était prête, debout devant la porte du palais. Elle hésita de longues minutes à entrer, puis elle secoua la tête. Elle sortit une lettre d'un repli de sa cape et la donna à un garde.
"Pourriez vous la porter au prince dans les plus brefs délais?"
"Ce sera fait dans l'immédiat."
Joignant le geste à la parole, il tourna les talons pour porter la lettre. Lettre qui expliquait à Kadaj qu'elle ne lui en voulait pas, qu'elle comprenait, mais que c'était trop dur pour elle, qu'elle rejoignait le convoi pour rentrer à Fal, et qu'elle ne reviendrait jamais.
"C'est mieux ainsi..." murmura-t-elle.
Puis, elle alla rejoindre le convoi.

Kadaj sortit sa tête de l'eau quand un garde fit irruption dans ses appartements.
"Sir, une jeune femme m'a donner cette lettre pour vous."
Kadaj lui débarrassa du papier qu'il lui tendait. Puis le garde s'en alla. En lisant la lettre, le prince sentit son coeur battre de plus en plus fort. Une fois qu'il eut fini sa lecture il chiffonna le papier et se précipita dans le couloir à toute allure espérant rattraper le convoi rapidement.
*Eireen... Je t'en pris, ne pars pas.*

Eireen entortillait les crins noirs de sa monture autour de son doigt. Elle réfléchissait. Que dire à son mari?
*Je crois que je ne vais pas rester à Fal...*
Le convoi s'était déjà éloigné. Elle se retourna sur sa selle. La cité disparaissait déjà derrière les dunes. Une unique larme coula sur sa joue.
*Adieu, Kadaj...*

Kadaj avait fait le plus vite possible, mais le convoi avait déjà prit la direction du désert. Décidé à ne pas laisser partir celle qui avait gagné son coeur, il avait prit Kuro et était directement partit pour le désert. Le convoi allait vers Fal, il n'y avait qu'un chemin donc. Une fois les remparts de la ville traversé, Kadaj fit accéléré son étalon, friand de vitesse. Après avoir passé deux dunes, il vit au loin un convoi. Sentant son coeur lui crever la poitrine, il serra un peu plus les rênes de sa monture.
*Eireen...*

"Cavalier droit derrière!"
Eireen se retourna sur sa selle. Un cavalier était en approche rapide. Elle fronça les sourcils, puis finit par savoir de qui il s'agissait.
*Kadaj...*
Son coeur s'affola subitement. Elle se tourna à nouveau correctement sur sa selle, mais stoppa sa monture.

Lorsqu'il fut assez proche du convoi, Kadaj fit ralentir sa monture. Le meneur vint à sa rencontre. Lorsqu'il reconnu le prince, il inclina la tête en guise de respect.
"Sir? Qu'est-ce qu'il vous amène-t-il?"
Kadaj se contenta de lui passer devant le nez.
"Il y a quelqu'un ici qui n'a pas sa place dans le convoi."
Kuro se faufila entre les autre de son espèce. Kadaj reconnu un peu plus loin Eireen. S'il n'y avait pas eu tant de monde il n'aurait sans doute pas réagit comme il allait le faire. Il passa devant elle et lui prit les rênes, entraînant Sun avec lui. Il guida La monture d'Eireen vers la cité. Lorsqu'il passa devant le meneur du groupe, il échangea un rapide regard.
"Vous pouvez continuer, bonne route."
Puis toujours au pas, Il continua vers la cité.

"Kadaj..."
Eireen était curieuse de savoir pourquoi il agissait de la sorte. Voulait-il la garder dans la cité, l'empêcher de retourner en Enkidiev? Surtout, pourquoi? Elle ne dit rien, mais tira sur les rênes de son cheval, qui s'arrêta. Elle attendit sans rien dire, jetant un oeil derrière elle. Le convoi avait disparu. Elle évita soigneusement son regard, ne sachant pas trop que faire, et surtout gênée.

Kadaj qui était dos à elle, arrêta sa monture lorsqu'elle arrêta la sienne. Il ne savait pas comment commencer. Tout était encore un peu embrouiller. Il n'arrivait pas à comprendre ce qu'il ressentait, même s'il il en était sûr. Comment l'expliquer avec des mots?
"Eireen, tu comptais vraiment partir pour ne plus jamais revenir?"

"Oui..."
Eireen baissa la voix, gardant toujours la tête résolument détournée. Elle enfouit ses doigts dans la crinière de Sun.
"C'est la seule chose à faire. Pourquoi m'as-tu empêché de partir?"
Elle regarda à nouveau derrière elle. En galopant, elle pouvait les rattraper...

Kadaj regarda toujours dans la direction opposé d'Eireen. Il hésitait.
"Parce que..."
Comment le dire? Avec Djin il n'avait jamais eu besoin de le dire.
"Je..."
Il fit faire volete face à Kuro et se trouva face à elle.
"Eireen, je ne veux pas que tu partes. Avant que..."
Non, pas comme ça...
"Eireen, je t'aime."
C'était peut être le plus simple.

Eireen se retourna vers lui, surprise, alors que son coeur se mettait à battre plus fort que jamais, comme en écho aux dernières paroles du prince.
"Tu..."
Elle se mordit la lèvre, sans doute pour empêcher l'explosion de joie. Elle l'effleura de son empathie, et pencha la tête, ne trouvant pas exactement ce qu'elle espérait.
"Tu n'en es pas sûr, c'est ça?"

Kadaj secoua la tête.
"C'est pas ça."
Il approcha Kuro de Sun jusqu'à ce que son pied touche celui de Eireen.
"Ce qu'il y a , c'est que j'aime deux femmes."

Eireen sentit son excitation retomber.
"Comment peux-tu aimer deux femmes? Je ne comprends pas..."
Elle baissa le regard. L'amour se concevait en se donnant entier à une unique personne. Elle était mariée, certes, mais il ne le savait pas, et son époux ignorait où elle était. Et le plus important: elle n'aimait absolument pas son mari. Son coeur ne battait que pour Kadaj.
"Je... Si je suis de trop, il vaut mieux que je parte, tu sais..."

Kadaj refusa d'un signe de tête.
"Ne pars pas, s'il te plait."
Il lui prit la main et baissa le regard. Il fallait qu'il lui explique. Il ne voulait pas qu'elle le comprenne mal.
"T'ai-je déjà parlé de Djin?"

Eireen secoua la tête.
"Non, jamais."
Elle laissa sa main dans la sienne et la serra un peu. Elle ferma lentement les yeux.
*Si tu savais combien je t'aime...*
Elle ne semblait même plus se rendre compte de la chaleur.

Kadaj regarda Eireen. il n'arrivait pas à détâaher son regard d'elle.
"Djin était ma fiancée. Elle a été enlevé et assassiné dans le désert."
Il n'aimait pas parler de cela. Des vieux souvenirs remontaient à la surface. Il devait se tourner vers l'avenir.
"Eireen, avant que je te rencontre, je n'aimais plus vivre. Tout m'était indifférent. Les couleur étaient devenues ternes et les saveurs fades. J'avais même l'impression que le soleil était plus là pour nous tuer que pour nous procurer de la chaleur et du bonheur."
Il prit la deuxième main de la jeune femme.
"Mais quand tu es venue ici et que j'ai apprit à te connaître, ma vie reprenait un sens. Je sais pourquoi tout les matins je me levais, pour toi. tu me redonnais envie de vivre. J'étais tellement habituer à vivre dans le passé, que je ne voyais même plus comment faire pour vivre dans le présent. Et tu es mon présent."

Eireen leva les yeux vers lui.
"Et si je te décevais? Si je n'étais pas ce que tu attends?"
Elle lui caressa doucement le dos des mains de ses pouces.
"Est-ce que tu vas constamment me comparer à elle?"
Elle se mordit la lèvre. Quelles qualités concrètes possédait-elle, mis à part sa beauté?

"Jamais je ne t'ai comparé à elle."
Il lui passa une main sur la joue délicatement.
"Comment pourrais-tu me décevoir? C'est presque impossible."
Il hésita un instant, puis posa délicatement ses lèvres sur celles de la jeune femme pour l'embrasser.

Eireen sentit à nouveau ses émotions exploser quand il l'embrassa. Elle répondit à son baiser avec toute la tendresse qu'elle était capable de donner. Quand leurs lèvres se séparèrent, elle resta un instant interdite.
"Je ne sais pas si tu as idée de combien je t'aime..."
Elle lui passa une main sur la joue et remonta dans ses cheveux. Puis, elle alla chercher un nouveau baiser passionné sur ses lèvres.

"Je t'aime..."
Kadaj posa son front contre celui d'Eireen. Il ferma les yeux, savourant l'instant. Cela faisait tellement longtemps qu'il n'avait pas ressenti cela. Le jeune homme frotta doucement le bout de son nez contre celui de la jeune femme. Le soleil se faisait fort et Kuro s'impatientait.
"On rentre?"

Eireen eut un sourire espiègle.
"Oui, avant de ressembler à des morceaux de viande grillés!"
Elle glissa sa main dans celle du prince, et donna un petit coup de talon à Sun, qui se mit en marche. Elle redevint un peu plus grave.
"Kadaj... Il y a un endroit de la cité que tu ne m'as jamais montré. Ca a un rapport avec Djin?"

La mine de Kadaj s'assombrit. Il acquiesça.
"Oui, c'est un jardin, là où a été dressé un mémorial en son honneur."
Il l'aimait tellement et Eireen aussi. Pourtant elles étaient totalement différentes. Il regarda la jeune femme à ses côtés.
"Pourquoi cette question? Tu désires y aller?"

Eireen hésita l'espace d'un instant.
"Oui, s'il te plaît."
Elle serra doucement sa main dans la sienne.
"Si ça ne te dérange pas."